[Traduction] De Tahrir à Tienenmen "les places publiques" ne peuvent échapper à l'Histoire


 Traduction d'un article de Lynn Neary publié sur www.npr.org



 
De la "Zocalo" de Mexico à la Piazza Navona de Rome, les places publiques ont toujours été une part vibrante de la vie urbaine. Après avoir visité l'Italie, l'éditrice Catie Marron commença à réfléchir à propos des différents rôles que ces espaces publiques pouvaient jouer. Elle demanda a quelques auteurs de partager leurs pensées à propos des places célèbres autour du monde, et l'assemblage de ces essais est contenu dans un nouveau livre appelé "City Squares".

Michael Kimmelman, l'un des auteurs participants, dit que l'important à propos d'une place est qu'elle fonctionne comme un aimant, en attirant les gens vers elle. A la différence d'un parc dans lequels les gens chercheraient à se retirer, la place mélange les individus d'une foule - c'est comme un organisme vivant au coeur d'une ville.

"Pour moi la place doit répondre à l'idée que nous nous faisons de ce qui fait la vie urbaine, qui dit pourquoi nous allons dans les villes, ce qu'on espère y trouver", dit Kimmelman. 
"Et cela se rattache beaucoup à l'esprit de communauté, de valeurs partagées, à une sensibilité aux choses plus grandes, à l'humanité." 
 
Kimmelman est le critique architecture du New-York Times, mais il dit que les bâtiments qui entourent une place ne sont pas si importants. Regardez les places de Rome : "Il y a la Piazza Navona, une place incroyablement belle avec ces grands buildings de [Francescso] Borromini et des sculptures de [Gian Lorenzo] Bernini" dit-il. "Mais à quelques pas de là il y a le Campo de' Fiori, qui est à mes yeux l'une des plus belles places d'Europe. Et il n'y a rien de particulièrement important à signaler à propos des bâtiments qui se trouvent autour, mais c'est une bulle de vie. Ca en dit autant sur les raisons qui font de Rome une ville magnifique et appréciée que la Piazza Navona."
 
Ces places romaines sont des endroits où les gens se rassemblent pour le plaisir - pour faire leurs achats sur les étals de légumes ou de fleurs, pour manger aux restaurants avoisinants, pour s'asseoir au bord d'une fontaine pour parler avec un ami. Peu de places sont aussi paisibles.

 
"Un vide étrange" sur la Place Tiananmen
Le 4 Juin 1989, des troupes chinoises ont ouvert le feu sur des manifestants réunis Place Tiananmen à Beijing. Sept ans plus tard, quand le contributeur à City Squares, Evan Osnos, se rendit en Chine pour la première fois en tant qu'étudiant et se dirigea directement vers la Place Tiananmen. "D'un certaine façon, pour moi, c'est inévitable - c'était le seul endroit où me rendre en premier" dit Osnos. "Je devais aller à Tinanmen si je voulais comprendre ce qu'étais la Chine et où elle essayait d'aller." Mais Osnos fut déçu par ce qu'il découvrit : le gouvernement chinois avait totalement réquisitionné l'espace autrefois occupé par des manifestants.
 
"A un moment il y avait eu des millions de personnes dans les rues de Beijing, à l'intérieur et autour de Tiananmen Square, mais lorsque je suis venu voir la place par moi-même, toute trace de ces événements avait disparu" dit-il. "Au point que le gouvernement avait fait retirer tous les bancs ou les arbres qui étaient sur les bordures de la place, parce qu'il ne voulait plus que les gens se rassemblement sur Tiananmen. Il y avait donc comme un étrange vide sur cette place.
 
La place qu'Osnos a découvert ne lui a rien dit de la direction que prenait la Chine - elle était à jamais rattachée au passé, à un événement dont les citoyens parlent encore en chuchotant tandis que le gouvernement s'évertue à leur faire oublier. Mais la place elle-même fait le constant rappel de ce qui s'est passé là-bas. "Les place retiennent leur Histoire" dit l'éditrice de City Squares, Catie Marron. "Elles ne peuvent vraiment pas y échapper."


"L'énergie spontanée" de la Place Tahrir
Ces dernières années, les mouvements sociaux ont trouvé leur carburant sur internet (la place virtuelle) mais ils ont bien vite débordé dans les rues. "Les réseaux sociaux ont vraiment annoncé ce qui allait se produire - cela à rassemble les gens sur la place, ils ont été prévenus" dit Marron. "Mais l'endroit où les manifestants ont fait entendre leur colère, là où leurs voix ont pu porter, ce n'était pas sur internet ; c'était au coeur de la place physique."

En 2011, quand les réseaux sociaux ont informé le monde entier de la manifestation anti-gouvernementale de Tahrir Square, le gouvernement égyptien fit bloquer Facebook et Twitter. Mais Jehane Noujaim qui participe au recueil City Squares dit que les décisions du gouvernement ont plutôt poussé les gens à rejoindre la place pour pouvoir comprendre ce qui s'y passait.

Noujaim a réalisé un documentaire nominé aux Oscars à propos de ces manifestation appelé "The Square". Elle explique : "J'ai grandi à dix minutes de cette place et je n'ai jamais vécu l'Égypte de la même façon que lorsque je m'y suis rendue à ce moment... Je me suis sentie égyptienne... Je me sentais fière de voir des individus se tenir debout pour ce en quoi ils croyaient et en essayant réellement de réécrire leur propre histoire. Et je n'ai jamais vu un nombre aussi important de gens qui parlent, dorment et montent des tentes ensemble. Et il y avait cette énergie spontanée qui poussait les gens à venir - venir avec une tente, une couverture, se joindre - sans pour autant savoir combien de temps cela tiendrait."

Cette énergie a laissé place aux dures réalités politiques d'Égypte. Noujaim dit de la Place Tahrir qu'elle symbolise toujours quelque chose à ses yeux, mais que désormais c'est un endroit stérile et aseptisé. Et s'il y a bien une chose que les contributeurs rendent claire dans ce livre, c'est que les places changent en permanence - tout comme les gens qui les remplissent.

(Lynn Neary : Article complet)
  
La Place Tahrir selon les époques.


L'ouvrage en question se trouve ici
(18 auteurs et 93 photographes)


!Projection de "The Square" à Amiens le Mardi 10 Mai (entrée libre)!
Sur facebook (extraits, infos, pdf)






Aucun commentaire: